LA GUERRE FROIDE (1946-1991)
A - Une division entre vainqueurs qui apparaît dès la guerre.
Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, deux grandes puissances nouvelles se dégagent dans le concert des nations : les États-Unis et l'URSS.
URSS et États-Unis ont été au premier rang de la victoire contre le Reich hitlérien et l'Empire du Japon, permettant ainsi de libérer l'Europe et l'Asie occupée et même une partie de l'Afrique. En 1945 leur prestige est immense, elles sont les plus grandes puissances mondiales.
L'URSS car son armée est la plus nombreuse du monde, les Etats-Unis, car ils ont l'industrie la plus puissante et ont créé et utilisé la bombe atomique.
Une image tirée d’un film soviétique réalisé lors du défilé de la Victoire à Moscou, sur la place rouge, le 24 juin 1945. La parade, la plus longue organisée sur la Place Rouge à ce jour, dure un peu plus de deux heures et mobilise plus de 40000 soldats.
Affiche soviétique datant de la période 1945-1953.
Mais des désaccords sont apparus entre les deux alliés dès 1943. Malgré les dénégations de Staline, les Alliés occidentaux ont des doutes sur les intentions du gouvernement de l'URSS à garantir la paix, la liberté et la démocratie chez les peuples qu'ils ont libérés. Par ailleurs, dès 1943, les Américains possèdent les preuves de la responsabilité des Soviétiques dans les massacres de la forêt de Katyn ou 20 000 membres de l'élite polonaise libérale ont été assassinés par les membres du NKVD soviétiques en 1940.
En 1946 la rupture entre l'Ouest, favorable à la restauration de la démocratie en Europe et sous influence américaine, et l'Est, sous domination soviétique est consommée.
Dans le discours de Fulton, prononcé par Winston Churchill alors ex-premier ministre, lors d'une conférence aux États-Unis en 1946 : Winston Churchill utilise l'expression "rideau de fer" pour expliciter la séparation du continent entre deux blocs.
Churchill à Fulton en 1946.
À la fin de la Seconde Guerre mondiale, l'Europe centrale et orientale sont occupées par l'Armée rouge (l'armée soviétique) qui a libéré la majeure partie de ces territoires, d'Est en Ouest.
Et dans le but d'étendre l’extension mondiale du communisme, l'URSS n'hésite pas à utiliser sa présence militaire dans les pays qu'elle occupe pour soutenir l'émergence de gouvernements communistes ou au moins favorables aux Soviétiques dans ces pays. Churchill est le premier homme politique occidental à mettre en lumière cet état de fait.
Document 1 : extrait du discours de Fulton par Winston Churchill
« De Stettin sur la Baltique à Trieste sur l'Adriatique, un rideau de fer est descendu à travers le continent. Derrière cette ligne se trouvent toutes les capitales des anciens États d'Europe centrale et orientale. Varsovie, Berlin, Prague, Vienne, Budapest, Belgrade, Bucarest et Sofia, toutes ces villes célèbres et les populations qui les entourent se trouvent désormais dans ce que je dois appeler la sphère soviétique, et sont toutes soumises, sous une forme ou sous une autre, non seulement à l'influence soviétique, mais aussi à un degré très élevé et, dans beaucoup de cas, à un degré croissant, au contrôle de Moscou. Le gouvernement polonais dominé par la Russie a été encouragé à empiéter largement et de façon illégitime sur l'Allemagne, et nous assistons actuellement à des expulsions massives de millions d'Allemands dans une mesure atroce et inimaginable. Les partis communistes, qui étaient très faibles dans tous ces États de l'Est européen, se sont vus élevés à une prédominance et un pouvoir bien au-delà de leur importance numérique et cherchent partout à accéder à un contrôle totalitaire. Des gouvernements policiers dominent dans presque tous les cas et, jusqu'à présent, à l'exception de la Tchécoslovaquie, il n'y a pas de vraie démocratie. Si le gouvernement soviétique tente maintenant, par une action séparée, de construire une Allemagne pro-communiste dans les régions qu'il contrôle, cela va provoquer de nouvelles difficultés sérieuses dans les zones britannique et américaine, et donner aux Allemands vaincus le pouvoir de se mettre eux-mêmes aux enchères entre les Soviétiques et les démocraties occidentales. Quelles que soient les conclusions que l'on peut tirer de ces faits - car ce sont des faits - ce n'est certainement pas là l'Europe libérée pour la construction de laquelle nous avons combattu. Ce n'est pas non plus une Europe qui présente les caractéristiques essentielles d'une paix durable.
1. Quelle expression utilise Winston Churchill pour désigner la frontière entre les pays occidentaux sous influence anglo-américaines, et selon lui, libres et démocratiques, et les pays sous influence soviétique, où, selon lui, l'exercice des libertés publiques est en train de disparaître?
2. Quels faits met en avant Winston Churchill pour appuyer l'idée que les libertés sont en train de disparaître dans la partie orientale de l'Europe? Et au profit de quelle puissance?
3. Quel processus pointe-t-il en Allemagne qui selon lui peut poser problème à peine un an après la fin de la guerre (et qui entraînera quoi)?
B. L'installation d'un monde bipolaire
L'Europe, est lieu d'émergence des tensions entre États-Unis et Union Soviétique et les premières crises de ce qui sera qualifiée de "Guerre froide" se déroulent en Europe.
La première étape de la Guerre froide est la mise en place des démocraties populaires par l'URSS à partir de 1945.
En Bulgarie, dès septembre 1944 les communistes présents au sein du "Front patriotique" (qui a pris le pouvoir le 9 septembre 1944 avec l'appui de l'Armée rouge) organise des épurations ciblées. Dès 1946, la République populaire de Bulgarie est proclamée et les partis d'opposition disparaissent.
En Pologne, en janvier 1947, à la suite d'élections truquées les communistes polonais du comité de Lublin prennent le pouvoir à Varsovie au détriment du gouvernement polonais légitime en exil à Londres depuis 1940.
En Roumanie, les partis d'opposition sont dissous et le 30 décembre 1947 le roi est contraint à l'abdication, dans la foulée est proclamée la République Populaire Roumaine.
En Tchécoslovaquie, en février 1948, les communistes tchécoslovaques concentrent tous les pouvoirs suite aux actions de milices ouvrières, c'est le "coup de Prague".
Bien que ce coup de force paramilitaire soit dénoncé par les Occidentaux, ceux-ci n'interviennent pas, l'URSS n'ayant pas participé directement aux événements et les Alliés ne souhaitant pas d'affrontement direct.
La réponse américaine est tardive. La doctrine officielle s’affine seulement à partir de 1947 lorsque le président américain républicain Harry Truman met en avant un objectif de limitation de l’expansionnisme soviétique c’est le "containment" (en français "endiguement"). Le 12 mars 1947, le président présente devant le Congrès américain sa doctrine du "containment" lors d’un discours largement médiatisé. Qui lance également dans le pays un mouvement de purge politique et intellectuelle : le maccarthysme (chasse aux sorcières anti-communistes dont seront victimes : l'écrivain Michael Gold, l'homme de théâtre Bertolt Brecht, Charlie Chaplin, Orson Welles, Anne Green, scénariste).
Les Américains ne chercheront pas à faire reculer le communisme en Europe par la force mais à seulement et surtout à partir de 1948 à empêcher son extension hors des démocraties populaires nées avant 1948, pour éviter tout affrontement direct avec leur ancien allié. Les Etats-Unis refuseront de s'associer au guerre coloniale françaises (Guerre d'Indochine 1947-1954 et Guerre d'Algérie 1954-1962) et anglaise (opération associée à la France de Suez en 1956).
En réponse, en 1947, en URSS, le 22 septembre 1947 le rapport Jdanov est rendu public. L'URSS oppose dans sa propagande le "camp impérialiste" (les occidentaux) contre "camp des pacifistes" (les soviétiques). Jdanov, troisième secrétaire du parti communiste, condamne dans son discours, l'impérialisme et la colonisation américaine en Europe et prône la démocratie nouvelle. Il souligne que l’Union soviétique soutiendra le “mouvement ouvrier démocratique”, fondé sur les partis communistes du monde en Europe ainsi que sur les combattants des mouvements de libération dans les pays coloniaux.
Caricature allemande exposant les différences en matière de vie politique entre l'Est et l'Ouest de l'Europe après 1945.
1. Qui sont les personnages géants représentés, que personnifient-ils?
2. Qui sont représentés par les petits personnages en blanc?
3. Que cherchent à faire les deux grands personnages avec leurs couvre-chefs?
4. Quel problème rencontre le personnage de gauche que ne rencontre pas le personnage de droite et pourquoi?
5. Quelle est dès lors l'idée générale du dessin?
Ci-dessous, caricature de John Collins : Semis de printemps, 1948
1. Présentez le document et décrivez-le.
2. Quelle est donc la position de l'artiste J. Collins vis-à-vis de la Guerre froide ?
Face à la politique russe d'expansion du communisme la réponse américaine
sera :
- l'accélération de la mise en place du plan Marshall un plan d'aide américain de 16,5 milliards de dollars de crédit (l'équivalent de 175 milliards de dollars en 2022) décidé pour aider au redressement de l'économie libérale de l'Europe de l'Ouest et mis en place à partir de 1948.
- la création de l'OTAN (Organisation du traité de l'Atlantique Nord) une alliance militaire visant à prémunir l'Europe d'une agression soviétique par l'occasion d'une défense commune. En cas d’agression soviétique, tous les pays de l'OTAN se promettent mutuellement assistance le 4 avril 1949 lors de la signature du traité.
Les Américains, craignant pour la survie de la démocratie en Europe, acceptent l'idée de maintenir des troupes après guerre sur le territoire européen et de s'investir dans le remodelage du continent, en premier lieu en Allemagne.
La guerre froide est caractérisée comme étant un conflit surtout diplomatique et économique, un affrontement indirect. Jamais entre 1947 et 1991 les deux ennemis (États-Unis et Union Soviétique) n'entreront en guerre l'un contre l'autre.
C. La Guerre froide : une suite de périodes de crises aiguës et de périodes de détente.
Première grande crise, le blocus de Berlin :
Entre le 24 juin 1948 et le 12 mai 1949, les soviétiques empêchent tout ravitaillement de Berlin Ouest (occupés par les Occidentaux) pour protester contre l'unification des zones d'occupation américaine, française et anglaise en Allemagne (unification voulue en réaction à la fermeture de l'économie Est-allemande par les Soviétiques et leur refus d’abandonner l’idée de réparations économiques immédiate et leur refus de créer une monnaie commune et de participer à la création d’une monnaie commune).
Des citoyens allemands observent le pont aérien sur Berlin, entre 1948 et 1949.
Entre 1950-1953, avec la Guerre de Corée : l'affrontement devient mondial. Suite à l'offensive de l'armée Nord-coréenne, les Occidentaux, sous mandat de l'ONU, garantissent l'intégrité de la Corée du Sud et ramènent la ligne de démarcation entre les deux Corées au 38ème parallèle.
À partir du 13 août 1961 : nouvelle crise, à Berlin. Pour empêcher la fuite des citoyens Est-allemand, la RDA militarise la frontière entre les deux Allemagnes et, littéralement, construit un mur pour isoler Berlin-Ouest de Berlin-Est.
La construction du mur photographié depuis Berlin-Ouest.
Le président américain John Fitzgerald Kennedy à Berlin en 1961.
Un soldat de la NVA, l’armée de la RDA (République Démocratique Allemande, l’Allemagne de l’Est, ou DDR pour Deutsche Demokratische Republik) fuit le pays le 15 août 1961.
Le mur de Berlin dans les années 1980.
Une carte du mur. Années 1980.
Le rideau de fer et les pays “atlantistes” dans les années 1980.
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